L’assassinat de l’Ambassadeur de l’Italie en RD Congo, à Goma – Qui l’a tué ?

Monsieur Luca Attanasio, l’Ambassadeur de l’Italie en République Démocratique du Congo, est tombé victime d’une attaque barbare des assaillants, pendant qu’il avait quitté la ville de Goma, capitale de la province du Nord-Kivu, pour se rendre en direction de Rutshuru. La tragédie s’est produite en plein parc national de Virunga, dans un endroit situé entre Kilima Nyoka et Kanyamahoro, à une dizaine de kilomètres au nord de la ville de Goma, dans une zone sensiblement rapprochée de la frontière rwandaise. Tout se passe comme si un groupe ordinaire de bandits tentait de piller un convoi de PAM ou d’en kidnapper les membres pour exiger une rançon.

Cette scène macabre, s’inscrivant bien sûr dans le cadre de la vaste insécurité qui domine l’est de la RD Congo en général, et le Nork-Kivu et l’Ituri en particulier, mérite une attention particulière. Mais, d’emblée, il y a lieu d’espérer que, par cet événement, le monde pourra maintenant absolument comprendre que les cris d’émoi des hommes, femmes et enfants menacés d’extermination dans l’est de la RD Congo, plus particulièrement sur l’axe Goma-Rutshuru-Butembo, à Beni, en Ituri, aux hauts plateaux du Sud-Kivu, ne sont nullement une fiction, mais une réalité extrêmement atroce et tragique qui n’épargnera personne.

Quelques questions de grande pertinence à la communauté internationale…

L’Ambassadeur Italien en RD Congo se fait fusiller dans un endroit bien connu par le monde entier comme une zone à très haut risque depuis plus de vingt ans. Pourquoi aurait-il pris ce risque en toute évidence suicidaire en suivant cette route au moment où la MONUSCO ne lui aurait certainement pas refusé l’assistance de ses hélicoptères s’il en sollicitait? Aurait-il été piégé par des informations déformées au sujet de la situation sécuritaire dans cette région? Le courage à prendre un tel risque serait-il la preuve que le monde occidental et la communauté internationale minimisent ou ne croient pas à la souffrance, aux atrocités et à la tragédie qui déciment la vie des milliers de congolais à l’est de la RD Congo, et c’est pourquoi le monde des “décideurs tout-puissants” continuent à afficher une indifférence étonnante devant les massacres génocidaires de Beni? Y aurait-il raison de croire que, désormais, la mort tragique et ignoble de l’illustre ambassadeur Luca Attanasio aidera la communauté internationale à recouvrer un coeur sensible et humain pour considérer avec compassion la souffrance des congolais de Kivu-Ituri de manière à y apporter promptement la solution qui s’impose ?…

Le grand étonnement dans les opinions congolaises se situe au niveau des faits tels que, au même moment (toujours ce lundi 22 février 2021 vers 10 heures) où l’Ambassadeur Italien tombait dans l’embuscade avec sa suite près de Goma, un autre convoi des voyageurs congolais entraient dans une autre embuscade sur l’axe routier Beni – Kasindi, dans la région de Beni avec un bilan comparativement plus lourd de plus d’une dizaine de victimes, mais dont on ne parlement absolument pas dans le réseau mondial, pendant que les trois morts de Goma ont ébranlé le monde entier en mois d’une heure.

En effet, tout porte à croire que les moyens pour résoudre le problème de sécurité dans l’est de la RDC est à portée de main, mais c’est la volonté qui fait défaut.

En fait, qui aurait tué l’Ambassadeur Italien et pourquoi?

A priori, l’hypothèse facile porte à pointer du doigt le monde des FDLR. Ceci se comprend assez. Car les Hutu rwandais et leurs organisations politico-rebelles se sont rendus maîtres de l’espace du parc national de Virunga qui s’étend du territoire de Nyiragongo à celui de Rutshuru, après s’y être installés depuis 1994.Ce sont eux qui ont initié dans cette zone la culture de braquage, pillage et kidnapping que les bandits autochtones ne savaient pas pratiquer.

Mais aujourd’hui ce genre de criminalité est devenu un mode de business auquel beaucoup de catégories de personnes ont se sont engagées pour pallier à leur misère sociale au dépens de la paisible population condamnée à devenir victime innocente. D’où, aux côtés des FDLR, les attaques armées sur les routes du parc de Virunga et ailleurs sont également l’œuvre des bandits autochtones ainsi que des éléments indisciplinés émergeant des FARDC qui tentent ainsi de compenser le non paiement de leurs dus ou de suppléer à leur salaire dérisoire.

Ne jamais oublier que c’est le Rwanda qui a le contrôle du terrain au Nord-Kivu…

Au-delà de la face visible de la scène décrite ci-dessus, il est très important de fouiller dans ce qui se cache derrière le rideau. Pendant, ces deux dernières décennies, souvent les pires de crime enregistrés au Nord-Kivu ne sont pas commis par les FDLR véritables, mais par des agents secrets opérant au compte du régime de Kigali pour ternir davantage l’image de l’opposition Hutu rwandaise en exile, pour trouver un argument puissant dans sa détermination à refuser toute négociation ou concession politique avec lesdits opposants.

Le Rwanda, plus que les services de sécurité congolais, contrôle cette zone à concurrence égale avec les FDLR. Kigali a également recruté ses propres “faux FDLR” qu’il fait opérer dans la même zone où se trouvent les vrais FDLR. Ces agents pro-Kigali sont souvent des ex-FDLR qui, après leur rapatriement au Rwanda, ont été recyclés puis retournés dans l’est de la RD Congo avec des nouvelles consignes de travail données par le pouvoir en place au Rwanda.

S’agissant du dossier de ce 22 février 2021, Il sied de noter que l’Ambassadeur Luca Attanasio a été attaqué dans une zone se trouvant sous la surveillance permanente de la sécurité rwandaise. Bien plus, la zone ici concernée se situe sur l’axe connu comme itinéraire principal de l’infiltration des troupes rwandaises se déployant en direction de Masisi, sud de Lubero, Rutshuru, les alentours de Goma et même plus au nord jusqu’à Beni et en Ituri. Cette situation a fait l’objet de l’alerte que la société civile de Nyiragongo a lancée avec une grande inquiétude depuis quelques semaines, juste après la célébration du début de la nouvelle année 2021.

Bref, amplifier la responsabilité des crimes enregistrés dans le parc national de Virunga est bien sûr la chose la plus facile. Cependant, croire aux actions de sabotage sécuritaire menées par les mains camouflées du Rwanda sera certes la chose la plus hardie, et pourtant l’expérience prouve suffisamment que c’est justement la finesse des œuvres clandestines de ce voisin qui a transformé la vie de la population de Goma et ses environs, voire toute la province du Nord-Kivu, en un véritable calvaire. Le régime de Kigali est prêt à tout faire, s’il peut en tirer la légitimation de renvoyer officiellement ses troupes en RD Congo, dont il ne cesse de clamer devant le monde l’incapacité de se gérer dans le sens de la promotion de la paix et le développement dans la sous-région.

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